Fatshi béton na béton, Anthony Tshis le Boss, le baron Christian Tshisekedi, SG Augustin Kabuya et Peter Kazadi : l'heure des dédicaces dans les albums a sonné! - Profondeur

Après 37 années de disette, il est plus que temps pour les nouveaux riches de jouir maintenant qu’ils ont accédé au pouvoir. Villas, costumes, voitures de marque, mariage de rêve et voyages en business class qui taraudaient encore l’esprit des anciens opposants ne constituent plus un frein à la satisfaction de leurs besoins.

À l’instar des années Mobutu et Kabila où les dignitaires et leurs enfants prenaient plaisir à se faire chanter et dédicacer par les musiciens dans leurs chansons, cette tradition continue d’être respectée même après l’avènement au pouvoir de ceux qui ont longtemps promis la rupture avec les mauvaises pratiques.

Ainsi, l’on peut régulièrement écouter des dédicaces des membres de la famille présidentielle à commencer par le chef de l’État lui-même jusqu’à atteindre les membres du gouvernement en passant par ceux du parti présidentiel.

Peut-on échapper au phénomène libanga?

Dans un pays où la musique nous accompagne du berceau jusqu’à la tombe, il s’avère difficile mais pas impossible d’échapper au phénomène libanga (dédicace).

Dans ce cas de figure, une personne a enseigné par l’exemple et il s’agit de Matata Ponyo Augustin. Membre du gouvernement à l’époque, alors que son chef Kabila et tous les autres dignitaires du régime se faisaient dédicacer ; l’homme à la cravate s’est opposé catégoriquement au regretté Papa Wemba d’heureuse mémoire, qui avait pris le risque de le lancer dans l’une de ses chansons sur demande du fils de Matata Ponyo, a expliqué l’artiste musicien dans l’une de ses interviews. Matata Ponyo n’a pas apprécié l’acte posé par Papa Wemba et il a obligé celui-ci de rentrer au studio pour écraser cette dédicace, menaçant même l’artiste musicien de le traduire en justice en cas de refus. Une belle leçon à d’autres acteurs politiques qui sont présents dans tous les concerts et spectacles des musiciens en quête de “libanga”, sauf là où se prennent les grandes décisions pour la survie de l’État.

Aucune étude n’a prouvé que la réussite d’un mandat passe par les dédicaces dans les albums des musiciens. Il revient certes aux dirigeants de mettre en place une bonne politique pour piloter tous les secteurs de la vie mais cela ne sous-entend pas une amitié entre les musiciens et les dirigeants.

Que gagne-t-on après un dédicace?

“Fatshi béton na béton, first lady Dénise Nyakeru, Anthony Tshis le Boss, le baron Christian Tshisekedi, la noblesse dans le sang Molendo Sakombi, l’argentier de la République Nicolas Kazadi, Maître Peter Kazadi, SG Augustin Kabuya”… c’est des noms qu’on peut entendre régulièrement dans différentes chansons de nos artistes musiciens actuellement. Dans un pays où les gens vivent avec une moyenne de 1$ par jour, il est aberrant que les gens cherchent la notoriété à coup des billets verts car les informations en notre possession renseignent qu’une dédicace peut coûter jusqu’à 10.000$.

Dans cette optique, les plus grands bénéficiaires sont les musiciens qui tirent profit des sommes déboursées par les différentes personnalités soucieuses de se faire une notoriété alors qu’en réalité les précédents cycles électoraux ont vu des gens comme Adam Bombole, Maître Dorothée Madiya et consorts perdre face à des noms jamais prononcés dans des chansons.

Des véritables caméléons, l’affection de ces musiciens envers leurs bienfaiteurs varient en fonction du temps et même de régime politique au pouvoir. Qui entend encore les noms de Kabila, Kimbuta, Boshab, Minaku, Muzito, Kinuani, Papy Kake la foudre, Pipina, Grevi Mfutila, Robert Basende, Adam Bombole et consorts dans les albums? Cette question est une interpellation pour ceux qui préfèrent investir dans l’oisiveté plutôt que dans des projets sérieux des jeunes.

Par Hervé Itoma

Directeur Général