Plus de raison d’avoir une dent contre la Belgique ? Pas sûr. A voir comment Juliana Lumumba serrait ses dents en lisant son discours, c’est que quelque chose est resté en travers de la gorge. Sans parler entre ses dents, la fille du héros africain a articulé des questions assassines : «Père, comment es-tu mort? Quand es-tu mort? Où es-tu mort? Où as-tu été assassiné? Qui t’ont assassiné et pourquoi?»
Il est donc prématuré de croire que les Congolais n’auront plus rien à se mettre sous la dent par rapport au dossier Lumumba. Ceux qui pensaient désormais croquer la vie à pleines dents à la faveur de la restitution de la dent de Patrice Emery Lumumba n’ont peut-être pas compris que l’Histoire n’a pas encore dit son dernier mot.
En procédant par de telles enjambées, ils risquent de se casser les dents. Avoir les dents longues là où le sang humain crie sinon vengeance, du moins réponse aux questions égrenées tel un chapelet par Juliana, n’est pas la meilleure de postures. Les Congolais, dont l’écrasante majorité est composée de sans-dents, se reconnaissent dans le cri du cœur des enfants Lumumba.
En ce moment où l’histoire bégaie à nouveau (a-t-elle jamais cessé de le faire depuis?), d’autres acteurs aux dents longues veulent remettre au goût du jour la balkanisation. Comme l’avait prédit Lumumba en son temps, ils vont se casser les dents.
Toutes dents dehors depuis qu’ils occupent Bunagana, ils finiront par n’avoir plus rien à se mettre sous la dent. N’ayant certes pas de quoi remplir une dent creuse, les Congolais ont cependant les dents du bonheur. Eux qui, depuis un quart de siècle, luttent pour leur souveraineté.
Aux planificateurs et aux exécuteurs du saucissonnage du Congo, ils n’ont qu’une seule réponse: la balkanisation ? Quand les poules auront des dents!
José NAWEJ